La communication est souvent
identifiée à un échange bruyant de parole. Mais on n’oublie parfois que la
communication n’est pas que parole. Le silence aussi est une communication et
même la meilleure communication surtout pour des personnes qui se connaissent
bien. Observez les couples ; légitimes ou pas, ils communiquent parfaitement
bien par le silence.
Aujourd’hui, les médias ont
évolué de manière vertigineuse. Leur technologie s’est compliquée au point
finalement de n’en faire qu’un vaste complexe miniaturisé entre nos mains. La
multimédiatisation de nos moyens de communication tend à privilégier
l’expression sonore sans jamais nous permettre de nous recueillir. Il produit
tellement des bruits que le silence devient une denrée rare. Le multimédia nous
offre un bonheur paradoxal du fait d’oublier que l’homme est fait de
parole et de silence. Le primat de la parole dans la communication
contemporaine a fait de nous des hommes sans intérieur. Notre superficialité se
lit également au travers de celle de notre parole, quelle qu’elle soit :
politique, religieuse ou économique. Une parole profonde est la conséquence
logique d’un silence, lui aussi, profond.
Plaidoyer pour les médias du silence
L’expression peut surprendre
à première vue tant elle verse dans un paradoxe : comment les médias
peuvent-ils pousser au silence ? Pourtant, pour que notre monde, et
singulièrement notre pays retrouve la paix sur tous les plans, tout doit partir
d’une intériorité retrouvée. Nous sommes véritablement des hommes sans
intériorité, trop superficiels. On ne saurait retrouver cette intériorité que
si nous nous employons à user de nos médias dans le sens à favoriser aussi le
silence, le recueillement.
Le média du silence
favorisant toute parole profonde existe : c’est le livre. Nous échangeons
avec l’auteur et probablement avec des auteurs dans le silence de notre lieu de
lecture. Après avoir mûri notre réflexion à travers cette communication
silencieuse, nous pouvons répondre à l’autre par la parole en prenant appui sur
les arguments que nous avons construits après lecture ou que nous lui avons
empruntés.
Malheureusement, ce média du
silence ne bénéficie que d’une faible attention de la part des dirigeants de
notre cité. Il manque des bibliothèques publiques pour ancrer la profondeur de
notre parole prochaine. Si déjà en 1967, il n’y avait plus que 24 bibliothèques
publiques sur les deux cents répertoriées en 1959, nous nous demandons combien
y en a-t-il aujourd’hui quand on sait que Mobutu avait pris tellement en
aversion la démocratie qu’il craignait d’avoir une opinion publique
suffisamment formée et informée. Bref,
pour couper court, nous avons choisi le bruit qui rabaisse ou nivelle par le
bas en lieu et place du silence qui élève.
Conséquences d’un manque d’intériorité
Aimons donc ce média du silence et réfléchissons également dans le silence pour sortir le Congo de son sous-développement. Pour cela, l’autorité devrait veiller à ce qu’il y ait moins de pollution sonore ; ce qui crée un vrai climat de silence propice pour un travail sérieux.
Les bruits de nos médias et
celui des structures initialement commises à procurer de l’intériorité ont
altéré notre communication au quotidien. Puisque nous ne savons même pas entrer
en communication avec Dieu dans le silence, il devient manifestement impossible
de le faire avec l’autre en face de nous. Une blague reçue sur Internet sur la
manière dont les kinois répondent aux questions trahit bien cette crise
d’intériorité. On répond presque mécaniquement à une question par une autre
parce qu’on n’a pas observé le silence nécessaire qu’exige toute bonne réponse.
Cette communication interrogative est la preuve d’une fracture sociale bien
plus psychologique qu’objective. En apparence, tout donne l’air d’aller mais en profondeur, rien
ne va. Pourtant, quand nous chantons l’hymne national, nous affirmons avoir été
unis par le sort. Cette union par le sort devrait nous amener à considérer et
privilégier cette diversité qui suppose que nous devons développer notre pays dans
l’ouverture à l’autre.
Nous sommes aujourd’hui une
démocratie en quête de consolidation. Les principes fondateurs ne sauraient
être maîtrisés que dans le silence de notre cœur à travers l’acte de lecture.
Celle-ci doit être d’abord publique mais aussi scolaire. L’école doit préparer
les citoyens à aimer la lecture au-delà de la scolarité car les évolutions du
monde bénéficient souvent des analyses qui sont cachées dans des livres. Faute
de les comprendre, on dispose de plus de chances de commettre les mêmes erreurs
que ceux qui nous ont devancés. Ceci peut donner un coup d’arrêt à notre
avancement démocratique et nous faire repartir de zéro. Aimons donc ce média du silence et réfléchissons également dans le silence pour sortir le Congo de son sous-développement. Pour cela, l’autorité devrait veiller à ce qu’il y ait moins de pollution sonore ; ce qui crée un vrai climat de silence propice pour un travail sérieux.
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