lundi 17 juin 2013

Médias du silence



La communication est souvent identifiée à un échange bruyant de parole. Mais on n’oublie parfois que la communication n’est pas que parole. Le silence aussi est une communication et même la meilleure communication surtout pour des personnes qui se connaissent bien. Observez les couples ; légitimes ou pas, ils communiquent parfaitement bien par le silence.


Aujourd’hui, les médias ont évolué de manière vertigineuse. Leur technologie s’est compliquée au point finalement de n’en faire qu’un vaste complexe miniaturisé entre nos mains. La multimédiatisation de nos moyens de communication tend à privilégier l’expression sonore sans jamais nous permettre de nous recueillir. Il produit tellement des bruits que le silence devient une denrée rare. Le multimédia nous offre un bonheur paradoxal du fait d’oublier que l’homme est fait de parole et de silence. Le primat de la parole dans la communication contemporaine a fait de nous des hommes sans intérieur. Notre superficialité se lit également au travers de celle de notre parole, quelle qu’elle soit : politique, religieuse ou économique. Une parole profonde est la conséquence logique d’un silence, lui aussi, profond.

Plaidoyer pour les médias du silence

L’expression peut surprendre à première vue tant elle verse dans un paradoxe : comment les médias peuvent-ils pousser au silence ? Pourtant, pour que notre monde, et singulièrement notre pays retrouve la paix sur tous les plans, tout doit partir d’une intériorité retrouvée. Nous sommes véritablement des hommes sans intériorité, trop superficiels. On ne saurait retrouver cette intériorité que si nous nous employons à user de nos médias dans le sens à favoriser aussi le silence, le recueillement.
Le média du silence favorisant toute parole profonde existe : c’est le livre. Nous échangeons avec l’auteur et probablement avec des auteurs dans le silence de notre lieu de lecture. Après avoir mûri notre réflexion à travers cette communication silencieuse, nous pouvons répondre à l’autre par la parole en prenant appui sur les arguments que nous avons construits après lecture ou que nous lui avons empruntés.
Malheureusement, ce média du silence ne bénéficie que d’une faible attention de la part des dirigeants de notre cité. Il manque des bibliothèques publiques pour ancrer la profondeur de notre parole prochaine. Si déjà en 1967, il n’y avait plus que 24 bibliothèques publiques sur les deux cents répertoriées en 1959, nous nous demandons combien y en a-t-il aujourd’hui quand on sait que Mobutu avait pris tellement en aversion la démocratie qu’il craignait d’avoir une opinion publique suffisamment formée et informée.  Bref, pour couper court, nous avons choisi le bruit qui rabaisse ou nivelle par le bas en lieu et place du silence qui élève.

Conséquences d’un manque d’intériorité


Les bruits de nos médias et celui des structures initialement commises à procurer de l’intériorité ont altéré notre communication au quotidien. Puisque nous ne savons même pas entrer en communication avec Dieu dans le silence, il devient manifestement impossible de le faire avec l’autre en face de nous. Une blague reçue sur Internet sur la manière dont les kinois répondent aux questions trahit bien cette crise d’intériorité. On répond presque mécaniquement à une question par une autre parce qu’on n’a pas observé le silence nécessaire qu’exige toute bonne réponse. Cette communication interrogative est la preuve d’une fracture sociale bien plus psychologique qu’objective. En apparence, tout  donne l’air d’aller mais en profondeur, rien ne va. Pourtant, quand nous chantons l’hymne national, nous affirmons avoir été unis par le sort. Cette union par le sort devrait nous amener à considérer et privilégier cette diversité qui suppose que nous devons développer notre pays dans l’ouverture à l’autre.
Nous sommes aujourd’hui une démocratie en quête de consolidation. Les principes fondateurs ne sauraient être maîtrisés que dans le silence de notre cœur à travers l’acte de lecture. Celle-ci doit être d’abord publique mais aussi scolaire. L’école doit préparer les citoyens à aimer la lecture au-delà de la scolarité car les évolutions du monde bénéficient souvent des analyses qui sont cachées dans des livres. Faute de les comprendre, on dispose de plus de chances de commettre les mêmes erreurs que ceux qui nous ont devancés. Ceci peut donner un coup d’arrêt à notre avancement démocratique et nous faire repartir de zéro.
Aimons donc ce média du silence et réfléchissons également dans le silence pour sortir le Congo de son sous-développement. Pour cela, l’autorité devrait veiller à ce qu’il y ait moins de pollution sonore ; ce qui crée un vrai climat de silence propice pour un travail sérieux. 
 
 


 

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